samedi 20 octobre 2007

LA PERSONNALITE MORALE




La Société, une personne morale




Si l’acte de naissance d’une société est un acte de volonté, un contrat, celle-ci devient en principe, une personne morale, une fois accomplies les formalités de publicité. A partir de cet instant, la société existe en tant que personne juridique et se distingue de la personne des associés qui se sont groupés pour lui donner naissance. Elle devient donc par la suite un sujet de droit, distinct de la personne des associés qui l’ont créée.

Elle est un être qui transcende les personnalités de ceux qui la composent. Elle a un intérêt propre, que ses organes doivent prendre en compte. Elle sera responsable, en son propre nom, des préjudices qu’elle pourrait causer.



I) La notion de Personnalité Morale

La personnalité morale est la personnalité juridique d’une entité considérée comme un sujet de droit en soi, distincte de la personne des membres qui la composent. La personne morale est titulaire de droits et obligations en son nom propre.

Si pour une personne physique, la personnalité juridique est acquise dès la naissance, une personne morale, elle ne s’acquiert qu’après un certain nombre de formalités.

La personnalité morale est elle une véritable et pure fiction ou au contraire une réalité ? Des auteurs sont divisés sur ce point donc il nous conviendra d’indiquer la solution retenue par le droit positif.

A – La thèse d la fiction :

C’est la thèse la plus ancienne soutenue par Ihering. Selon cette première école doctrinale, seules les personnes physiques, les êtres humains, sont aptes à devenir sujet de droit. Si l’on accepte de reconnaître la personnalité juridique à un groupement de personnes, voire une masse de biens, une telle reconnaissance ne peut naître que d’un acte de volonté de l’Etat. La personnalité est une pure fiction pour permettre aux sociétés de fonctionner. La personnalité juridique attribuée à un groupement de personnes ne peut donc découler que de l’accomplissement d’une certaine formalité : l’immatriculation au Registre du commerce et des sociétés pour une société, la déclaration en préfecture pour une association.

B - La thèse de la réalité :

Développée par le Doyen Geny, cette thèse soutient au contraire que la reconnaissance étatique n’est pas nécessaire à l’existence de la personnalité morale.
Ici, seule la réalité compte pour ces partisans de cette seconde école doctrinale. Or, l’observation de cette réalité montre que la volonté d’un groupement de personnes, est autre chose que la somme des volontés individuelles de ses membres. La personnalité morale devrait alors découler de la seule observation de la manifestation de volonté des associés.

C – La solution retenue par le droit positif :

La théorie de la fiction et la théorie de la réalité semblent coexister aujourd’hui dans le droit positif.

Dans un premier temps, la Cour de Cassation avait consacré la thèse de la réalité dans un arrêt du 28 Janvier 1954 : « attendu que la personnalité civile n’est pas une création de la loi ; qu’elle appartient en principe, à tout groupement pourvu d’une possibilité d’expression collective pour la défense d’intérêts licites, dignes par suite, d’être juridiquement reconnus et protégés ».

Dans un deuxième temps, le législateur a appliqué la théorie de la fiction en subordonnant la naissance de la personnalité morale d’un certain nombre de groupements à une formalité administrative, donc à une reconnaissance étatique. Il s’agit de l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés pour une société, un groupement d’intérêt économiques et de la déclaration à la préfecture pour une association.

II) Etude de la personnalité juridique de la société :

A - La société sujet de droit :

La société est une entité juridique même si elle n’a pas de réalité matérielle et qu’elle résulte d’un concept de droit positif qui en déterminera le régime. La société a donc une complète autonomie ce qui suppose de l’identifier.

1) L’autonomie de la société :

La société est un sujet e droit autonome et jouira de droit subjectif et en contre partie elle est soumise à des obligations. Cette autonomie permet de la distinguer de ses membres. Elle a des droits subjectifs qui ne peuvent être exercé en son nom et pour son compte que par ses représentants. Les actes conclus en son nom n’engagent qu’elle au jour de l’acquisition de la personnalité morale.

La société dotée de la personnalité morale peut agir en justice pour la défense de ses intérêts propres, peut participer au commerce juridique, peut passer tout type de contrat, peut voir sa responsabilité civile et pénale (depuis la loi Perben II).

2) L’identification de la société :

Elle est impérative pour des raisons de police administrative, pour assurer une plus grande efficacité et transparence des activités économiques.


a) la Dénomination sociale :
Toute personne morale a une dénomination sociale mentionnée dans les statuts et accompagnée de la forme juridique choisie. Les associés composent librement le nom de la société en y intégrant éventuellement le nom des associés, une appellation fantaisiste, le nom d’un tiers, l’activité de l’entreprise, un sigle, une marque.
Toutefois, il faut respecter des conditions tels qu’il ne faut pas porter atteinte aux droits privatifs détenus par une autre personne, ne pas entretenir la confusion dans l’esprit du public entre deux sociétés. Les fondateurs doivent faire une recherche d’antériorité auprès de L’Institut national de la propriété industrielle qui centralise les fichiers tenus par les Registre du commerce et des sociétés


b) La domiciliation :
Le siège social est le domicile de la personne morale. Il est le lieu de réunion des organes d’administration et direction de la société. Le siège social permet de déterminer le lieu où doivent être effectuées les formalités légales de publicité, la loi applicable, la nationalité de la société, les tribunaux compétents. C’est le lieu de rattachement juridique. Le siège social est situé au lieu du principal
Établissement c'est-à-dire où se trouve le centre de vie juridique de la société.

Les fonctions du siège social :

- Quand la société est assignée en justice c’est le siège social qui déterminera le tribunal compétent Il permet de déterminer le lieu où les formalités doivent être réalisées

- Il permet de déterminer la nationalité de la société.
Les tiers peuvent se prévaloir de la théorie de l’apparence c'est-à-dire qu’en fonction de leurs intérêts les tiers pourrait soit se référer au siège social soit se référer au siège réel. En cas de changement de domiciliation, les statuts doivent être modifiés et les formalités doivent être accomplies pour rendre cette modification opposable aux tiers. En cas de transfert de siège social hors de la France, cela nécessite en principe l’accord unanime des associés et cela est considéré par le droit fiscal comme une liquidation de la société et la naissance d’une nouvelle société. Pour cette raison, il existe un projet de directive communautaire appelé 14ème directive relative à la coordination du transfert de siège social ente plusieurs Etats membres de l’Union Européenne.


c) La Nationalité de la société :


Toutes les sociétés sont rattachées à un Etat, dont elles prennent la nationalité. Ce rattachement permet de connaître la loi applicable à la société : toute société dont le siège social est situé en territoire français est française et de ce fait soumise à la loi française. Le transfert du siège social à l’étranger est une modification statutaire votée à l’unanimité des associés. Il entraîne en principe un changement de nationalité.

d) La durée :
La durée de la société est déterminée par les statuts. La durée court à compter du jour de l’immigration au RCS. En aucun cas, elle ne peut excéder 99 ans. Un an au moins avant la date d’expiration de la société, les associés doivent être réunis pour statuer sur la prorogation de la société. A défaut, tout associé peut demander au président du tribunal de commerce la désignation d’un mandataire chargé de réunir les associés.

B) La société titulaire de droit propre :

Le patrimoine c’est l’universalité de bien appartenant à un sujet de droit qui dispose sur ce patrimoine un droit d’exploitation et de transmission.

1) Composition du patrimoine social :

Dans le patrimoine social on distingue l’actif et le passif du capital. L’actif se compose de l’actif immobilisé (immobilisation incorporelles, immobilisation corporelles, immobilisations financières) et l’actif circulant (stocks et en cours, créances, valeurs mobilières de placement, disponibilités). Le passif lui est composé des capitaux propres et les dettes (dettes financières, dettes d’exploitation, dettes diverses).

2) L’autonomie du patrimoine sociale :

Quand la société acquiert la Personnalité Morale et donc un patrimoine, ses biens et dettes se distinguent en principe de ceux des associés dès lors que les créanciers sociaux ne viennent pas en concours des créanciers personnel des associés.
Les créanciers sociaux bénéficient seuls du Patrimoine social comme gage commun de leur créance. Une nuance doit être faite pour les Société à risque illimité, les créanciers sociaux acquièrent un droit contre la société et les associés. Dans ces sociétés à responsabilité illimité même si il y a un patrimoine social autonome les associés sont tenus aux dettes. Alors que dans les sociétés à Responsabilité limité l’autonomie est parfaite. Ici, les créanciers n’ont de droit que contre la société sur son patrimoine et non aucun droit contre les associés sur les patrimoines personnels.

III) Les actes passés pendant la période de formation :

Pendant la période qui s’écoule entre le moment où les associés conviennent de constituer une société et l’immatriculation, il est nécessaire de conclure des contrats au nom et pour le compte de la société qui n’a pas la personnalité morale : ouverture d’un compte en banque, bail des locaux du siège social…Après l’immatriculation, la société reprendra ces actes à son compte, selon diverses modalités.
L’absence de personnalité morale de la société rend les signataires responsables des actes antérieurs à l’immatriculation, jusqu’à la reprise des actes par la société une fois qu’elle sera immatriculée :

¤Selon l’article L.210-6al.2 du code de commerce : « Les personnes qui ont agi au nom d’une société en formation avant qu’elle ait acquis la personnalité morale sont tenues solidairement et indéfiniment responsables des actes accomplis, à moins que la société après avoir été régulièrement constituée et immatriculée ne reprennent les engagements souscrits. Ces engagements sont réputés avoir été souscrits dès l’origine par la société »
¤Les personnes qui ont agi au nom d’une société civile en formation sont tenues des obligations nées des actes accomplis sans solidarité.

1) La reprise des contrats signés avant immatriculation au RCS :

Les conditions préalables :

Seuls peuvent être repris par la société :

¤ Les actes passés au nom de la société, ce qui suppose l’identification de celle-ci dans chaque acte. Les fondateurs doivent prendre garde à préciser que l’acte est passé au nom et pour le compte de la société en formation.

¤ Les actes passés dans l’intérêt de la société.

2) Le défaut de reprise des contrats :

En l’absence d’immatriculation au RCS, se pose le problème de la responsabilité de ces contrats :

¤ Soit la société n’a pas d’activité régulière : si les associés se sont donné mandat spécial pour agir, ils sont indéfiniment et solidairement responsables de l’exécution des contrats ; en l’absence de mandat spécial, la personne ou les personnes qui ont agi sont responsables de l’exécution du contrat et des dettes qui en découlent ;

¤ Soit la société a commencé une activité durable et effective : le créancier impayé a intérêt à obtenir la requalification en société créée de fait devant le tribunal de commerce. Dans ce cas, si l’objet est civil, les associés engagent leur responsabilité indéfinie et conjointe vis-à-vis des tiers, si l’objet est commercial, ils sont indéfiniment et solidairement responsables à l’égard des tiers.

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